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Pensée du moment

"Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde".
Mohandas Karamchand Gandhi
25 novembre 2007 7 25 /11 /novembre /2007 23:42
D’abord, il y a un grand portail noir, qui doit peser la demi tonne. Lourd et réticent à l’ouverture, autant qu’à la fermeture, et sonore dans le moindre de ses mouvements. Tu peux pousser fort, sans avoir peur de vaciller sous le coup d’un effort à fournir plus maigre que son apparence ne le suggère. Ce n’est pas une porte en carton.

Passé ce grand portail, il y a un long chemin, dans le sable et les dunes, comme sur les plages de Bretagne, de Vendée, du sable fin et blanc crème, des dunes qui semblent absorber la puissance du moindre de tes pas, des monts liquides affamés du moindre résidu de l’énergie que tu avais mis de côté pour les gravir. Quelques végétaux sont vivants ça et là, sans qu’on sache trop ce dont ils se nourrissent tant le ciel est avare dans ces contrées. Les nuages passent mais ne versent pas, pour une raison que je me suis résolu à accepter sans explication. Ce n’est pas comme si tu étais en Bretagne.

Au bout du chemin, quelque part vers la plage, il faudra prendre une barque, car tu te retrouveras dans une crique bordée de rochers de toutes parts. Rien de bien difficile, sauf qu’il faut ramer fort, car sur cette plage, tu seras constamment contre les courants. Des courants dignes des baïnes des Landes qui emportent touristes allemands et hollandais au loin, avec peu d’espoir d’échapper au Zodiac des sauveteurs si ils veulent finir en vie.

Mais si tu es déterminée, si tu es convaincue de trouver à destination de ton voyage ce que tu recherches, tu vaincras ces courants. D’autres l’ont fait et réussi, quoi que les courants fussent plus cléments en leurs temps respectifs.

Puis arrivée sur cette autre plage, tu discerneras une grotte, découverte à marrée basse, et si tu t’engouffres dedans entre 2 vagues, il te faudra encore trouver ton chemin dans ce labyrinthe de stalactites calcaires et de tunnels qui répliquent le son de tes pas comme un kaléidoscope sonore déroutant. Il te faudra surveiller la marée qui risquerait de rattraper ton entreprise un peu folle : la grotte est située sous le niveau de la plus basse des marées hautes de l’année.

Arrivée à mi chemin, tu reprendras une barque sur le rivage d’un lac souterrain, situé au dessus du niveau de la mer et dont la surface de cristal est si peu troublée par le vent qui n’y existe pas qu’elle réplique à l’identique le plafond néogothique de cette cathédrale naturelle. Le spectacle est magnifique, dit-on, mais le lac est immense -il a la taille d’un pays comme la France d’après les rares explorateurs qui ont réussi à en atteindre le bout.

Mais le bout ne t’intéresse pas, ce qui t’intéresse réside dans une zone centrale qui est assez difficile à localiser, mais qui est visible à certaines bonne âmes par une magie qui m’est tout à fait incompréhensible.

Au centre, donc, se trouve une île, minuscule, mais qui te laissera tout de même accoster et tirer ta barque –ne la laisse pas filer, c’est ton seul espoir de t’en tirer si les choses tournent mal.

Les îles, un peu partout, cachent toutes sortent de rêves et de légendes, nourrissent l’imaginaire de civilisations entières. Certains y cachent le Roi Arthur en compagnie du Saint Graal, d’autres y déposent carrément des mondes entiers comme l’Atlantide, d’autres encore y établissent le fantasme de leurs idoles ressuscités, ou encore ayant mis en scène leur propre disparition qui couleraient d’heureux jours à l’abri du tumulte du monde moderne.

Mon île n’est rien de tout ça, ou si peu. Au fond de la terre, près du magma, dans le noir et les roches volcaniques, mon île est un simple amas de sédiments -un Ayers Rock miniature dont seul le sommet affleure. Pas de cocotiers, pas de civilisation merveilleuse perdue, pas de colonnes grecques, pas d’arènes désormais sous-marines ayant servie de siège à d’imaginaires combats de taureaux antiques commentés par Platon plusieurs siècles après. Pas de monde englouti.

Ou presque. A défaut d’englouti, il est là, caché des yeux du monde, timide, protégé des photons qui l’abîment de rebondir dessus.

Il s’est rétracté, il a fondu, il a jadis porté ses espoirs, puis la vie, le temps et les grumeaux du destin l’ont réduit à la portion vitale, le noyau indispensable à tout être humain qui entend en garder le qualificatif.

Sur cette île, il y a un bunker, de style allemand 39-45, avec des murs de béton qui ont poussé tout seuls pour y protéger un coffre. Un coffre fort, qu’on s’entende, tu n’as tout de même pas fait tout ce chemin pour tomber sur une malle de pirate comme dans les histoires pour enfants, ou encore une charade récitée par un chevalier grisonnant à l’armure couinante qui t’attend depuis des siècles, restons sérieux. Ce coffre, la combinaison existe, n’est pas trouvable par quelqu’un qui ne cherche pas la profondeur des sentiments, ni par quelqu’un qui entend se reposer des aléas de la vie, ou encore qui cherche les choses bien comme il faut en ayant fait un tableau comparatif des options les plus habiles pour réussir. Ce bunker n’est pas là par hasard. Cette île, comprend le bien, a été le lieu de combats héroïques, le champ de batailles plus meurtrières que Verdun, le siège de violences dont on n’a pas idée. Elle a vécu le brasier de l’arme atomique, ou tout comme.

Quand tu ouvriras le coffre, si tu le peux, il y aura quelques résidus carbonisés du passé. Des je t’aimes hypocrites, des étreintes passionnées convaincues du contraire, puis aussi, des authentiques n’ayant pas résisté au souffle du temps, à l’usure de l’âge, des utopies ternies par l’oxydation, des fantasmes aux couleurs jaunies comme des photos des années 70. Des rêves de film hollywoodien, quelques sentiments sincères fossilisés, tellement enracinés dans mon être que plusieurs années après je n’arrive toujours pas à les éliminer. Il y a des ruptures, des pertes, des envies d’en finir, tout ça sous une épaisse couche de poussière, signe qu’on n’y a pas touché depuis bien longtemps, même si on en distingue toujours les titres.

Puis sur une autre étagère, il y a un minuscule sachet en papier. Il n’y a rien d’écrit dessus, pas même une mention au crayon à papier léger comme on pourrait s’y attendre. Dans ce sachet, il y a juste quelques graines, plus beaucoup j’en ai bien peur. Si tu prends une de ces graines et que tu l’arroses, que tu donnes tout ce que tu peux d’attention et de chaleur, de lumière, d’amour et que tu y croies du fond du cœur, elle donnera une plante hésitante au début, frêle, pâle, fragile, puis plus forte, plus vraie, qui puisera profond son eau, qui ira haut chercher sa lumière, son énergie, pour en donner à son tour. Cette plante, un jour, fera partie de moi, puis de nous, autant que le sang qui coule dans nos veines, autant que les idées qui nous animent. Elle devra résister aux tempêtes, à l’hiver, à la sécheresse, aux manques d’attention, aux questionnements, aux errements passagers. Jusqu’ici, ce n’est jamais arrivé…mais peut-être un jour, elle deviendra un arbre, un grand arbre fort aux branches torturées, qui inspire le respect. Et qui sait ? peut-être encore, gagnée par la confiance, enseulée par le temps, enivrée de la beauté du son des grains du temps qui coulent sur son feuillage, aimant la vie, tout simplement, grâce à toi, elle voudra enfin s’entourer d’une forêt tout entière, la plus belle et grande forêt, qui deviendra, finalement, le centre de mon petit monde intérieur.

Taliesin


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17 septembre 2007 1 17 /09 /septembre /2007 22:16
Et voilà… des vacances, du vide, de l’air, de nouvelles rencontres, de nouvelles femmes, on pourrait presque dire : un nouveau départ.

On a pourtant du mal à croire que ses meilleurs moments avec une personne, choses immatérielles si l’en est, sont réduits à l’état de quelques photos égarées sur un disque dur et de la bonne volonté d’une poignée de neurones répartis dans 2 cerveaux différents. Moi j’ai du mal à y croire. En fait, je ne veux pas le croire. C’est plutôt ça le problème.

Je sais qu’arrivé à un certain point entre 2 personnes, il y a une chance infime pour que quoi que ce soit puisse à nouveau se passer entre elles. Les 2 personnes sont les mêmes, dans les mêmes corps, faits des mêmes cellules, dans les mêmes conditions sociales… mais le poids du passé et des souvenirs est trop fort pour que l’envie revienne et convainque simultanément les 2 parties…

Mais comment oublier, quand on n’en a pas envie ? L’envie, toujours cette putain d’envie, y’a pas à dire, dans tout, c’est vraiment la clé. Il y a dans mon cerveau une partie qui ne veut  pas oublier et enterrer ces souvenirs sous autant de couches que des barils de boue radioactive sorties fraîchement de la centrale locale.

Comment oublier ces moments magiques où le temps semble suspendu et où la vie semble s’ouvrir enfin comme par magie, comme un rideau de théâtre qui s’écarte et nous découvre le décor de notre futur bonheur : des moments simples, vrais et donc beaux, des fous rires, des câlins, des jouissances vertigineuses, des gosses, un chez soi… tout ce qui magnifie la vie quotidienne, les soirées entre amis, jusqu’à la cuisine qui paraît subitement un lieu où on peut s’amuser. Ces moments où l’on découvre la pièce qu’on est venu voir, cette pièce qui est notre vie et pour laquelle le script n’est pas vraiment connu d’avance.

Quelques bribes jamais fixées

Et pourtant je les ai écrites, ressenties, pensées… mais jamais vraiment couchées sur le papier :

« Il est 5h, peut-être 6…Cela fait 2 heures que te regarde. Je suis réveillé comme en plein jour, comme un après midi d’été, incapable de refermer l’oeil. Le décalage horaire encore dans les pattes, impossible de retrouver une horloge biologique normale avant 1 bonne semaine de souffrance. Mais à ce moment précis, la souffrance est douce et j’aimerais que dure cet instant suspendu.

Toutes les villes un peu anglo-saxonnes ont le même son. Ca commence par un grondement sourd, quand le trafic se réveille, puis le son de plus en plus précis de la circulation, peu de klaxons mais des sirènes de police à la Strasky et Hutch. On distingue les bus, tous automatiques, qui crachent leur nuage de pollution après chaque feu rouge, chaque arrêt. A mesure que le trafic piétonnier se réveille à son tour, quelques éclats de voix, mais pas trop, si caractéristiques à l’anglais… Londres, Dublin, Edimbourg maintenant Sydney qui n’y échappe pas. Je suis sûr que New York sonne pareil.

Je te regarde. Ton visage est apaisé, naturel, fin. Tu sembles enfin relaxée des tensions de ces dernières semaines. Je te regarde et je retrouve ce charme si subtil dont je suis tombé fou au deuxième des baisers que tu m’as donné. Ce charme typiquement toi que je n’ai jamais vu chez personne d’autre. Un mélange latin de beauté sauvage et de subtilité dans les détails, une chaleur suave et tropicale qui se dégage de toi, c’est inimitable.

Tes yeux bougent sous leur paupière. Tes cils en font l’écho. Quelques mouvements des lèvres. Tu rêves. Sûrement une chevauchée sur la plage, un rêve de voyage, de liberté, de plénitude. J’aimerais y être moi aussi, mais je suis condamné par mon horaire d’avion à continuer ce caviar de contemplation de ta beauté : la vie n’est parfois pas si cruelle, il faudra que je m’en souvienne.

Un rayon de lumière du matin s’amuse à venir effleurer ta joue. Il caresse ton grain de peau, fléchit sur tes pommettes, s’engouffre dans les méandres de ta chevelure argentine. Avant de s’évanouir, un souffle s’en arrête sur le bout de tes cils, presque providentiellement, alors qu’un autre plus fluide qu'aérien coule dans le lit d’une mèche de cheveux avant de mourir dans le delta de l’oreiller. C’est une vision photographique en direct. Plus belle que ce que n’importe quel studio pourrait sortir. C’est une rivière de photons qui fait de toi une Venus antique en couleur, là, endormie, sous mes yeux. Tu peux me croire, Michel Ange en serait devenu hétéro. Dans quelques heures il y aura une étreinte, passionnée comme toujours, qui finira en jouissance à la limite de la limite qui nous fait à chaque fois chavirer.

Tu es si belle. Je sais que nous sommes différents mais je sais aussi que nous réussirons à nous comprendre. Ca sera dur, peut-être.

Des fois j’aimerais pénétrer ton cerveau et lui dire, en direct « comprends moi, aime moi, je ne te combats pas, je cherche à te comprendre, je t’aime. »

A défaut de pouvoir y pénétrer, je te chuchote quand même ces 3 derniers mots, tout juste plus fort que la circulation au dehors. Tu marmonnes quelque chose, incompréhensible, sûrement de l’espagnol, tu sers ma main dans la tienne. Je me sers contre toi dans le grondement de la ville et de ses détails sonores, je me perds dans tes cheveux qui sentent la plage et le soleil. Je donnerais tout ce que j’ai pour que ce moment ne s’arrête jamais, que la trotteuse s’arrête de trotter, que la circulation tourne à jamais autour du pâté de building, que les voitures de police Strasky et Hutch n’atteignent jamais leurs malfrats, que le soleil ne bouge plus, que les bus crachent leur pollution pour toujours, que les piétons piétinent sous la fenêtre jusqu’au prochain Big Bang. Que le monde entier soit au courant que tel bonheur peut exister et que, béat d’admiration devant telle pureté, il accepte de prolonger cet instant pour l’éternité, ne serait ce que pour qu’une personne au moins reçoive en une seule fois une dose d’amour qui soulagerait les peines de l ’humanité toute entière si elle lui était partagée. Je t’aime Soledad. »

C’était il y a 5 mois. Tout cela va-t-il disparaître comme si ça n’avait jamais existé ? Ne sommes nous réellement qu’ombre et poussière ? Telle magie peut-elle s’évanouir sans laisser aucune trace ?

Fixer… l’écriture, le dessin, la photo… aurais-je une obsession de la perte de ce que j’aime ?

Taliesin

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1 juin 2007 5 01 /06 /juin /2007 20:51
Un récent billet de B&M m'a fait bien réfléchir ces derniers temps. Son billet parlait de s'arrêter un peu de courir les jupons pour se construire. Se construire... Aussi loin que je me souvienne, c'est une réflexion que je me suis toujours faite après une rupture.

Quand j'ai cassé avec Alice, je me souviens m'être retrouvé comme un con, ayant mis bien à distance tous mes amis proches (l'erreur du débutant des relations longues me direz vous, oui, je ne la fais plus depuis un baille). Durant cette période bien difficile, je n'ai entendu qu'une phrase "Tal, il est temps pour toi de te construire". Diantre, il était vrai que, bien qu'étant passionné de plein de trucs, je n'avais jamais vraiment fait grand chose de ma vie. A part mes études plutôt réussies, et le fait d'avoir vécu à l'étranger, je n'avais jamais eu de projet façon mec un peu bohème qui va se la ramener avec sa n-ième mission humanitaire lors d'un apéro chez les potes, ni de projet d'aller explorer le Guatemala en short avec un seul t-shirt et un sac à dos déchiré (mais de marque, ça fait mieux). A l'époque donc, je me souviens aussi m'être demandé ce que je voulais faire de tout ce temps libre et de ce vide intersidéral qu'était devenu ma vie, véritable désert volcanique  peuplé de ma solitude,  de moi et de la trilogie su samedi soir (c'est beau ce que j'écris!). J'ai donc fait plein de choses, et sui devenu, sur le papier, une véritable homme orchestre des activités extraprofessionnelles : en plus d'être rentré dans un groupe de rock au boulot, je suis progressivement devenu un véritable magasin décathlon ambulant : équitation, surf, planche à voile, tennis, tout ce qui me bottait de loin et même de très loin y est passé. C'était bien, oui, mais tellement artificiel et si peu moi.

Si j'adore les chevaux, faire du saut d'obstacle me paralysait parfois. Le surf, même si les sensations sont vraiment sympas, est d'une part un sport de galérien : il faut ramer comme une brute pour passer la barre, avant de faire la queue pour prendre sa vague attitrée, qui a une chance sur deux d'être "molle" ("y'a pas de power today, mec, ça envoie pas du gros ") et donc de ne rien faire d'autre que de vous ramener... mollement, de l'autre côté de la barre qu'il va falloir repasser. D'autre part, c'est aussi un sport de blond décoloré qui se la pète un peu (sûrement fatigué de se prendre des vagues molles et de ramer contre les rouleaux) au bar en expliquant tous les méga-tubes qu'il s'est pris... on se demande bien quand. La planche à voile, moins un sport de branlos mais tout de même un peu, nécessite quand même un peu d'entraînement pour devenir bon, mais je trouve que c'est un des sports les plus sympas que j'ai essayé. Le tennis aussi était très bon mais me donnait bien des tendinites, et jouer par 42 degrés sur un cours me fatigue un peu, en plus de me lyophiliser assez rapidement.

A cette époque j'ai eu la chance de rencontrer des personnes qui sont devenues de super amis depuis, et j'ai rencontré Kathy, alors même que ma motivation dans mon processus pourtant résigné de "construction" était quasiment inexistante, pour ne pas dire totalement morte. Me sentais-je plus "construit"?

Non sûrement pas, j'avais même l'impression de m'être attribué une personnalité de mec ultra  sportif prêt à sauter dans le premier avion pour aller sauver un bébé baleine au Groenland qui ne me correspondait pas trop. Si je ne suis pas pantouflard non plus, que j'adore voyager, que j’aime le sport, et que je suis encore moins insensible à la condition des mammifères marins, je sais aussi que je suis quelqu'un de cérébral et d'assez intérieur.

C'est Kathy qui m'a aidé à me recentrer sur mes envies, mes attentes, ce qui faisait de moi  ce que je suis : quelqu'un de sensible, qui aime explorer sa pensée, réfléchir, divaguer, refaire le monde, aider ses proches, et profiter du quotidien plutôt que de le subir. Ca peut paraître débile et méprisable, mais me réveiller peinard un dimanche matin, bouquiner au pieu, me faire une bouffe aux chandelles avec ma douce ou encore aller boire un verre avec des potes me comble infiniment plus que de me faire un ride jusqu'en Corse par force 8. Cette part intérieure de moi, bien qu'ayant toujours été présente, avait curieusement été masquée par ce processus de construction entamé après ma rupture avec Alice, alors que celle-ci était censée me révéler. Kathy, m'a finalement plus appris que tout ça, que le cheval, le surf, la planche, le tennis, le catalogue UCPA, et , comble de tout, m'a fait énormément voyager, mademoiselle étant Londonienne de son état. Kathy m'a même fait redécouvrir mon amour de la photo que j'avais un peu trop tendance à laisser de côté dans ma décathlonite aigue.

Après ma rupture avec Kathy, encore une fois volontaire, ma vie était moins un désert, mais ce sentiment de manque de personnalité m'a encore une fois envahi, et donc le démon de la construction extraprofessionnelle s'est à nouveau emparé de moi. Catalogue UCPA à la rescousse, je me suis remis à faire travailler mon corps : tennis, planche, et même muscu 3 fois par semaine suffisamment intensive pour me ruiner le dos et écoper de 15 séances d'ostéo. Puis j'ai rencontré Soledad et tout ça est plus ou moins retombé une fois encore : la photo est revenue au premier plan, et le voyage (billets d'avions ci-joint, pour ceux qui suivent) est devenu presque le but d'une année de travail.

Aujourd’hui, après cette rupture avec Soledad, je suis à nouveau devant le fait accompli qu’à 30 berges, je ne sais toujours pas bien qui je suis. Certes, j'ai progressé, et j'ai dans mes gènes (ou ailleurs d'ailleurs) une partie de caractère bien carrée qui sait ce qu'elle veut, mais je sais que j'ai aussi toujours une dose de personnalité malléable et influençable qui me fait me poser mille questions à chaque choc sentimental plutôt que de me conforter dans mes buts et aspirations. Je reste perplexe quant aux conseils de "se construire" car, à chaque fois que j'ai essayée, c'était pour m'engager dans des voies qui n'en étaient pas et qui en tous cas ne me correspondaient pas vraiment. A fortiori, je me demande même si ce n’était pas tout simplement pour m’occuper, ou encore me donner une vie sociale.

Qu'est ce qui nous aide à nous construire? La réponse va paraître bien clientéliste à mes lecteurs les plus fidèles, mais pour moi ce sont les femmes. A coups sûr ce sont elles qui m'ont aidé à comprendre ce que je cherchais dans la vie, ce qui me motivait et qui j'étais, au moins partiellement, à défaut de savoir exactement qui je suis, et ce que je veux. Mieux, toutes m’ont appris ce que je ne veux pas. Elles ont toutes plus ou moins magnifiées une partie de moi, une passion qui auparavant était tranquille, mais qui avec elle est devenue un véritable pan de ma vie.

A mon avis les conseils du type "profites en pour te construire" ne doivent pas occulter le fait que ce sont les autres qui font de nous ce que nous sommes, et que ce sont les personnes les plus différentes qui nous en apprennent souvent le plus sur nous.

Taliesin

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28 mai 2006 7 28 /05 /mai /2006 22:26
Ce week-end, réunion de famille de grande envergure, fut un bon moment à regarder pousser les petits, pester les plus grands, et surtout gémir les parents. L’occasion aussi, de me rendre compte à quel point une enfance aujourd’hui est différente de celle d’il y a 20 ans.

C’est vrai, et sans faire d’esprit râleur, que les parents d’aujourd’hui, ont pour coutume de n’être pas contents de leurs enfants. Trop difficiles, hyperactifs, capricieux, casse-cous, jamais contents, désobéissants, pas assez autonomes, trop gâtés, ingrats, mauvais joueurs : ce sont ces enfants, décrits par leurs géniteurs, hors commentaires « câlins-merveilleux-trop mignons-très intelligents-très bons résultats à l’école ». Loin de m’abstraire de cette opinion, j’avoue être assez d’accord avec la vision un peu cauchemardesque que ces parents ont de leurs enfants. Je précise que j’adore ces enfants, non seulement parce qu’ils font partie de ma famille, mais aussi ont tous beaucoup de qualités, sont des personnes attachantes, et deviendront j’en suis sûr des gens accomplis. Mais en restant objectif, je ne peux m’empêcher de juger certains travers que je constate, de comparer tout ça à ma propre enfance (et à mes propres travers).

Ma référence pour juger tout cela, sans trop passer mes pensées au filtre embellissant qui patine les souvenirs? J’ai 2 paramètres dimensionnants en tête : le nombre pharaonique de jouets qu’ils possèdent et le fait qu’ils soient encore plus capricieux que Grisouille, ma petite chatte de gouttière que j’avais quand j’étais gosse, pourtant fréquemment enregistrée au niveau maximum du cassage de couilles, niveau mythique que théoriquement seul un chat peut atteindre après un entraînement poussé, des années de bons et loyaux services en massacre de moquettes dans un pavillon de banlieue, rejet systématique des pâtées pour chats les plus raffinées, ou encore record absolu du nombre d’entrées-sorties quotidiennes par la même fenêtre.

Je sais, c’est simpliste, mais il faut savoir se rattacher à des choses qu’on maîtrise dans la vie. Or si l’on compare, on se rend tout de même compte que ma Grisouille était finalement un modèle de sérénité féline et que mes bonbons étaient beaucoup moins en danger que je ne l’aurais cru à l’époque. Car c’est un doux euphémisme de dire que les enfants, aujourd’hui, sont difficiles.

Mettez les 30 minutes en voiture, voilà qu’ils n’en peuvent plus, prenez votre petit-dèj tranquille à 9h, mais mon pauvre, ils faut les occuper d’urgence sinon ils vont tout massacrer ! Las de demander « pourquoi ont-ils tous ces jouets s’il faut en plus faire constamment le GO ? », vous constatez aussi qu’à la première contradiction d’un de leur désir souverain, ils boudent, s’énervent, crient contre leurs parents, pleurent, se réfugient de leur côté pour montrer leur désaccord de façon physique. Ce comportement de diva contrariée passe encore car il ne coûte rien vous me direz, mais passez dans une boutique et il leur faut quelque chose sinon la journée est ruinée et ils vont faire la gueule jusqu’au soir. Forcément si vous offrez à l’un il faut offrir à tous car aucun n’est capable de comprendre qu’il n’y a pas forcément égalité en ce bas monde. Heureusement les grand-parents sont là avec leur(s) visa(s) premier et rajoutent la couche qui manquait au cas où pour qu’ils soient parfaitement trop gâtés. Que l’arbitre conteste un but au foot familial et ils sortent du jeu en pestant contre celui-ci, et vont pleurer dans leur chambre.

Tous ne sont pas comme ça bien entendu, mais certains nous ont fait démonstration assez franche de la disparition bien entamée du bon esprit et de la candeur légendaire dont l’enfance seule savait nous gratifier dans le temps.

Le pire, c’est que les parents eux-mêmes vous le disent et sont d’accord avec ça. Alors vous vous essayez à leur dire que peut-être, des fois, il ne faut pas céder, qu’il ne sert à rien de les sur-gâter, de les couver comme s’ils étaient en cristal, de leur pardonner tout, et que des fois, il faut aussi pousser une gueulante, et que ça fera du bien à leur enfant. Les réponses sont hélas souvent les mêmes : oui mais le monde a changé, oui mais on les voit tellement peu, et puis je ne veux pas le retrouver à l’hôpital, et blablabla. Est-ce pourtant un service à leur rendre que de céder à toutes leurs envies ? Est-ce un service à leur rendre que de les surprotéger ?

Je repensais à cette image, vue un jour alors que je faisais un footing matinal de lendemain de fête (comprenez à 14h) : 2 parents et leur enfant débutant en vélo, tellement harnaché, protégé, casqué, genouillèrisé, coudièrisé, qu’il en avait du mal à pédaler. Recouvert de son armure de plastique, il n’arrivait pas à avancer car ses protections le gênaient mais ses chutes ne lui faisaient rigoureusement rien. J’imagine qu’il doit encore avoir ses roulettes à l’heure qu’il est. Moi, je n’ai jamais eu de casque, ni rien dans le genre d’ailleurs.

Est-ce un service à leur rendre, que de leur éviter la douleur, les claques, les bleus, les genoux écorchés, le front qui saigne ? Est-ce un service à leur rendre que de leur éviter l’échec ?

Certains enfants d’aujourd’hui, en tous cas j’ai l’impression, ne connaissent que très peu l’échec. Que ce soit en situation de conflit avec leurs parents, ou encore en apprenant à faire du vélo, ils me semblent continuellement enveloppés d’une cocon laineux qui leur enlève la rugosité de la réalité. Tellement chouchoutés qu’il leur est normal de réussir, d‘avoir raison de tout et de tout le monde.

Pourtant, ne sommes-nous pas plus le résultat de nos échecs que de nos réussites ? N’est-ce pas en tombant qu’on apprend à marcher ? Que va-t-on engendrer comme société avec de telles éducations ? Ne risque-t-on pas d’avoir une armée de jolis adultes sans la moindre cicatrice mais avec la tête pleine d’eau ?

La société moderne me semble parfois malade d’elle-même. Elle engendre toute seule les travers qu’elle dénonce. Elle est devenu par les comportements individuels le système qu’elle veut pourtant combattre, chacun se conduisant comme un photon qui illumine l’image qu’il déteste. Incapable de réagir à ses propres comportements, incapable de se traiter en profondeur. Les individus se fondent dans une masse qu’ils ont créée, pour masquer des comportements personnels contraires à leurs idéaux.

Sommes nous bien sûrs de ne pas vouloir réagir à tout ça ?
 
Taliesin

PS : et j’oublie de vous parler de mon préféré, qui n’a pas fait la gueule une seule fois de tout le weekend, qui n’a pas râlé, chouiné, pleuré, pas une seule fois. Que du bon esprit et presque trop de pensées pour les autres : mon filleul, t’es le meilleur, je t’adore ! Et en plus tu joues au foot comme un dieu!

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14 mai 2006 7 14 /05 /mai /2006 21:01

3B


Henri Cartier-Bresson disait que la qualité de l’objectif d’un appareil n’était pour rien dans la force graphique d’une photo. En dessin, on dit souvent la même chose, les débutants se perdent dans la reproduction d’infinis détails quand leur composition est mauvaise, les proportions non respectées,  et les lignes de force de leur image n’y sont pas. Alors en bon débutant que je suis je m’essaie parfois à changer de style, à oublier mes détails, à me concentrer sur les lignes principales. Je sors le 3B, c’est brutal, charbonneux par endroit, imprécis partout, et ca donne un peu ça. Des fois, je suis satisfait… et des fois non.

Taliesin



Crédit photo : Bruno Bisang encore une fois! quel artiste...
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20 avril 2006 4 20 /04 /avril /2006 00:01
Je ne passe pas souvent te voir c’est vrai. Ca fait même un bail, on peut dire, que tu n’as pas vu ma pomme passer par chez toi. J’espère que tu comprends, au moins un peu, qu’il y a des choses, des gens, et des moments, qu’on met parfois de côté pour avancer dans la vie. On ne peut pas, on ne doit pas vivre dans les méandres des possibilités éconduites par le cours des événements, sans quoi on passe son temps à remonter l’horloge, mais sans jamais écouter son tic tac.

La dernière fois je suis resté silencieux. Trop de remous, trop de pensées négatives, une vie un peu à la dérive, situation difficile, je ne voulais pas que tu saches ça, que tu entendes à quel point je ne réussis pas ce que tu souhaiterais tant que je réussisse. Alors je me tais. C’est mieux comme ça.

Te souviens tu ? La dernière vraie discussion que nous avons eue remonte à 10 ans tout rond. C’était une journée un peu comme aujourd’hui, pas tout à fait belle mais annonciatrice de printemps, du froid qui plie bagage et nous fout la paix pour de bon, des bourgeons, des odeurs végétales qui aromatisent la saison. C’est con mais j’ai toujours aimé l’odeur de l’herbe coupée. Ca sent le bonheur, la fin des cours, les jeux de sociétés dans la cour, les jupes des filles qui raccourcissent.

Samedi midi. Poulet frites, bien mérité après une matinée passée à bûcher les maths et la thermo. Il y avait toi, ta douce, et moi. A table le sujet était assez comique, presque tragiquement d’ailleurs, puisque nous parlions de l’usage généralisé de la capote dans la jeunesse du moment, et oui, je me souviens aussi ton petit sourire malicieux quand je t’ai répondu, « oui, oui, pour les gâteries aussi… tu sais on n’a pas tout à fait le choix ». C’est que le sida n’épargne pas… et nous en savions malheureusement quelque chose. Mais nous en avons rit, comme nous le faisions pour beaucoup de sujets tragiques que nous avions vu d’un peu trop près ces 10 dernières années. Tu étais détendu, joyeux, même si usé par la maladie, cette joie paraissait un peu artificielle, arrachée par la morphine. Qu’importe me disais-je, un bon moment dans ce marasme est une petite victoire contre la vie pourrie de ces 4 dernières années. Hôpitaux, chimiothérapie, odeurs d’éther, docteurs dont on ne connaît pas le nom, professeurs qui viennent t'examiner, internes qu’on ne revoit jamais, examens à jeun, résultats incompréhensibles, urgences le samedi soir, perfusions, veines qui claquent, insomnies, crises de larmes, espoirs suite à un bon résultat, désillusions suite à un autre. Ca use aussi les proches, quoi qu’on en dise.

Tu sais j’ai adoré cette discussion et j’aimerais bien rigoler encore avec toi de ce genre de sujet. Je sais que je fais la gueule à chaque fois que je viens… mais je n’arrive tout simplement pas à te dire ce que j’ai sur le cœur…que tu me manques, que tu m’as appris énormément et que je ne l’utilise pas assez ; que cette solitude est envahissante, cette solitude de l’âme, celle qui te laisse dépourvu devant tous les choix de la vie quand les autres ont toujours une main sur l’épaule pour avancer. Tu m’as élevé seul, et maintenant je mesure le chemin accompli, la taille du défi que tu as su relever. Je n’aurais jamais réussi ça. C’était difficile mais tu m’as bien élevé, malgré mon parcours personnel un peu chaotique, mon personnage assez imparfait et des résultats pas forcément à la hauteur de tes espérances. C’est toi qui m’a fait ce que je suis, qui m’a appris la tendresse, le respect, le rire, la franchise, la réflexion. C’est toi, et la vie, qui ont fait de moi un homme. Je t’aime, et je crois que je ne te l’ai jamais dit. Je n’en ai pas eu le temps.

Pourtant à chaque fois je reste muet. Que dire dans cette situation ? Je m’essaie à te parler mais je doute beaucoup. Pour qui suis-je là ? Pour toi, ou pour moi ? Je me demande tout simplement si tu m’entends. Dans ce silence, dans cet univers minéral, derrière cette pierre, peux-tu encore m’entendre ?

Ce samedi là après manger je suis sorti acheter des clopes. Un petit tour en voiture, ta voiture d’ailleurs, 2 paquets de lucky light, le passage rituel à la pharmacie, et je revenais finir l’après-midi avec toi, pour rigoler, peut-être jouer un peu de gratte ensemble et puis aussi retourner bosser mes maths et ma thermo. Foutue thermo, et dire que j’avais pris l’option pour le plaisir.

Mais voilà les grands bouleversements de la vie s’opèrent toujours quand on ne s’y attend pas, et ce jour là, petit rayon de soleil au milieu de cette tempête que nous traversions depuis plusieurs années, j’avoue que c’était le dernier moment auquel j’aurais pensé que cela puisse arriver.

En revenant, c’était la panique. Les voisins, les cris ; le sang. Tu étais en train de partir. Où, j’avais du mal à comprendre, comment, pas plus, pourquoi à ce moment, pourquoi tout ce sang, pourquoi alors que nous étions si vulnérables, pourquoi pas dans nos pires moments, pourquoi pas sans nous, ailleurs, un autre jour. J’avais 19 ans à l’époque, et pas vraiment préparé à la chose. C’est débile, je sais, je doute qu’on puisse s’y préparer. Mon esprit était complètement arrêté devant ce spectacle, et seuls les réflexes ont su agir. Téléphone, 18, nom, adresse, problème, dégager le passage, évacuer tout le monde, crier s’il le faut.

C’est une personne bien versatile que nous croisâmes cet après midi là. De loin, imaginée œuvrant dans une chambre d’hôpital, sur un champ de bataille, elle paraît abstraite et mélancolique, noble et triste, parfois épique ou glorieuse ; de près, la mort est froide, mécanique, silencieuse. Elle t’a emmené, besogneuse, pressée. Bien concrète.

Quelques heures après, je me souviens commencer presque comme un robot la litanie des coups de fils, prévenir, prévenir, laisser des messages sur les répondeurs, entendre les mêmes réponses, les pleurs, les lamentations, les regrets. Je ne me souviens plus si ça me faisait du bien d’entendre de la compassion. J’en doute, en fait. Mais que peut-on dire d’autre en pareilles circonstances ?

Il y a 10 ans jour pour jour, dans la salle à manger, lumière filtrée et odeurs de friture, mon père s’écroulait par terre et mourrait sous mes yeux. On dit que les personnes que l’on aime ne meurent jamais. J’aimerais le croire, mais tu me manques terriblement.

Bye bye Papa.

Taliesin
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12 avril 2006 3 12 /04 /avril /2006 23:24
Un peu mieux déjà... mais y'a toujours quelque chose... serait-elle trop belle pour être couchée... sur du papier? ;o)




Taliesin

PS : désolé pour le contraste... j'ai un peu de mal avec mon scan.
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2 avril 2006 7 02 /04 /avril /2006 20:23
C’est certainement la partie de nous la plus révélatrice de ce que nous sommes, le miroir physique le plus fidèle de notre façon d’être. Je dirais même plus que le visage dont l’importance est beaucoup trop connue et entretenue pour qu’il reste une indication sincère de l’état d’esprit ou du caractère d’une personne. Les mains, c’est un peu du corps, de l’esprit, de l’humeur du moment, du métier, de la passion, de l’attention qu’on porte à soi.

J’ai toujours trouvé curieux le fait de voir tant de gens ne pas y faire attention. C’est généralement la deuxième chose que je regarde chez une femme… je vous laisse deviner la première. Elle me révèle un peu tout ce que je veux savoir. Non, je ne lis pas dans les lignes, mais il me suffit de les regarder pour connaître une bonne partie du caractère de leur propriétaire.

Traumatisées chez les stressées, objet de tous les soins chez les maniaques, simples et joyeuses chez les épanouis, les mains sont en plus d’être le premier contact physique avec le monde extérieur, le prolongement de ce long bordel qui nous fait réfléchir, ressentir, vibrer…aimer. Ce sont elles qui nous font apprécier la douceur d’une peau ou la chaleur d’un corps. Le premier contact vers la matière, le premier contact vers l’autre. La main serait-elle symbole universel du genre humain : si nous devions nous représenter par une seule partie de notre anatomie, ne ferions-nous pas comme nos ancêtres sur les murs des grottes où il s habitaient ?

Chez les belles femmes, elles sont souvent jolies, les ongles vernis. Chez les femmes qui se croient belles, elles sont souvent semblables, mais avec 1 cm de plus aux ongles. Mais elles sont aussi parfois brouillons, pleines d’encre, de numéros de téléphones sur le dessus, et appartiennent à de joyeux créatifs un peu tête en l’air ou bordéliques. Ou encore nature, précision millimétrique, ongles au vernis incolore chez les femmes d’affaires blondes à mèches brunes, talons hauts, tailleur noir. Une bague ou deux nous renseigne sur la coquetterie de la personne. Chez le manuel, la main est calleuse, durcie par le travail, forte et vous sert la main sans hésiter. Chez l’artiste, impossible de faire disparaître les traces de peinture, les couleurs sous les ongles. L’ingénieur, mains techniques, entretenues, sans fioritures.

Comment enfin ne pas parler des mains que je connais le mieux? Kathy, mon ex petite anglaise, des mains d’une beauté fragile, à la peau fine, très dignes, tout comme la personne qu’elle est, les ongles vernis de ces couleurs qu’elle a si belles au fond d’elle. Alice, mains de poupée, un peu négligées, qui vont à l’essentiel, sans avoir peur de rien. Blonde de 30 ans, bus matinal : mains timides, pas de vernis, pas de bagues. Blonde de 40, bus du soir : entretenues, bagues, diamants, jolies ongles, vernis classe, limite bourgeois.

Les mains enregistrent tout, notre vie, nos coups durs, nos chances et nos parcours. La prochaine fois que vous rencontrez une personne, avant de l’écouter, observez ses mains. Vous serez surpris !

Taliesin

PS : désolé, je recycle niveau dessin... je suis malade ;-(
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22 mars 2006 3 22 /03 /mars /2006 23:20
7h32. Le réveil sonne pour la 4ième fois, mon portable en option alarme pour la 3ième. Il faut pourtant vraiment que je réussisse le lancement de la fusée Taliesin. Ce matin, comme 5 matins par semaine, j’ai envie d’aller bosser comme de me retrouver seul dans les douches du gymnase club avec un grand noir culturiste (c’est-à-dire très peu je tiens à le préciser pour les nouveaux –total respect au passage à nos amis grands noirs et culturistes, tous mes potes, c’est simplement que je suis un garçon pudique). Et pourtant, pourtant, il faudra bien lancer cette foutue fusée pour qu’elle aille faire progresser le genre humain, la technologie moderne et accessoirement les cancers du cerveau, la fonte de la banquise, le taux de remplissage des décharges à ciel ouvert et la prolifération des algues toxiques dans la bassin d’Arcachon.

La vie moderne n’est pas forcément dure. En tous cas pas la mienne. Elle est usante. Tout manque de brillance, de couleur, d’ampleur, de souffle. Tout est gris, sent le raisonnable, le consensus. La passion en a été extraite, les sensations fortes, les causes perdues sont définitivement perdues… et oubliées. Quand on est cadre aujourd’hui, on bosse pour bosser. On y va tous les jours, on rentre tard, ca tombe sur le compte en banque à la fin du mois. Ce qu’on fait ? On s’en fout un peu, soyons francs. Il n’y a plus de grands projets fédérateurs, on ne va pas amener l’électricité dans les foyers jusqu’au plateau le plus paumé du Larzac (total respect à nos amis du Larzac bien sûr, c’est juste qu’ il n’y a pas forcément foule sur la place du village), on n’envoie plus de mecs sur la lune depuis qu’on a compris que ça coûtait plus cher que de tourner un film qui montrait un couillon habillé en cosmonaute, on n’apporte pas l’eau potable dans un village africain, on n’essaie plus de passer le mur du son depuis qu’on l’a passé (celle là à vrai dire je peux comprendre). En parlant d’envoyer un mec quelque part, il faut toujours que je m’envoie bosser moi.

7h40. La douche. Avec ça sur la gueule, je réussis péniblement à éloigner mon cerveau de son rêve le plus inavouable peuplé de femmes toutes moins farouches les unes que les autres et aussi de mes chefs déguisés en pingouins et mis en cage pour de bon. Un petit dej expéditif pour rester en vie jusqu’à midi sans agresser mes collègues de boulot de mes borborygmes survitaminés, puis c’est parti pour l’enfer du devoir (total respect aux Gis du Vietnam au passage, je n’ai pas pu m’en empêcher).

8h15. Il fait froid. Le vent me gifle dès la sortie de mon immeuble comme pour me rappeler que je n’habite pas à Antibes au milieu des petits vieux, mais à Paris banlieue avec toute la jeunesse active de mon pays qui passe ses journées à bâtir le monde de demain et du futur pour le bien du monde occidental et des générations qui viendront après nous ; c’est-à-dire celles qui essaieront de ne pas mourir de chaud, de froid, de faim, de sécheresse, d’inondation, bref, d’à peu près tout ce à quoi nous échappons égoïstement en leur préparant ce joli bordel.

J’arrive à ma station. Les rails, le quai, le monde, tous ces gens qui font le gueule, cette jolie fille qui fuit mon regard. J’ai l’air si mal réveillé que ça ? Arrivée du suppositoire métallique géant. Si si, des fois, il a vraiment l’air d’un suppo. On s’engouffre. Ca rentre difficilement. Ca serre. Mais ca rentre. Je me retrouve collé à la jolie fille qui fuyait mon regard. Position un tantinet gênante… contrôle toi mon petit. Mais de là où elle est, elle ne peut plus le fuir. Je la fixe. Ah ah, tu vois que j’avais pas l’air si mal réveillé que ça ! ! Hein qu’il est beau le monsieur ! ! Bon, je ne veux pas la terroriser non plus, j’arrête mon jeu de psychopathe, mais attention hein, recommence pas. La prochaine fois, quand tu me vois, tu viens me demander mon numéro de téléphone direct! Non mais. Ces femmes, je vous jure. Pourquoi ne sont-elles pas toutes à mes pieds ? ;-)

Déchargement des bestiaux 3 stations plus tard. Les portes s’ouvrent, tout le monde piétine, on dirait la marche de l’empereur. C’est un terminus de la ligne qui fait aussi train, métro, RER, bus, hélico, batmobile et tous les moyens de locomotions à l’exception du bateau (pourtant si pratique à Paris) sont dignement représentés. Forcément, ça attire un peu de monde. Le tunnel qui sort du quai est sursaturé, un train étant arrivé en même temps que mon suppositoire, et un RER régurgitant encore ses derniers occupants. Impossible de passer. Il doit bien y avoir 2000 personnes devant moi, dont 1000 qui veulent sortir de là par 12 tourniquets RATP dont 7 qui ne marchent pas. Inutile de résister. Je suis une fourmi, prise dans la mélasse de la vie parisienne. J’attend. 4 contrôleurs l’air hagard observent ce bordel mais ne font rien. Sorti de là, on est toujours sous terre –faut pas déconner non plus, mais il y a plus d’espace. Un grand hall souterrain, dont la voûte doit bien faire 15 mètres de haut. Des magasins pacotilles, du béton, une lumière blafarde, rien de beau, exceptées quelques jolies femmes talons haut et ordinateur portable en bandoulières au regard froid. Il y a des faux businessmen qui bousculent sans dire pardon, et moi qui essaie de marcher droit pour atteindre l’autre bout du hall. On croise les militaires, vigipirate oblige, qui doivent se faire mortellement chier à surveiller les poubelles, eux qui ont été entraînés au combat urbain contre les snipers à Sarajevo. J’arrive au terminus du bus. Il n’est pas là. Le quai est blindé. Il arrive. C’est la lutte pour rentrer et seuls les meilleurs spécimens –pas forcément les premiers arrivés, peuvent rentrer et profiterons de la nourriture et des femelles (eu.. je m’égare peut-être un peu là). Les autres loupent un tour. Bien fait pour eux, la prochaine fois ils seront plus forts et concentrés sur l’arrivée du bus :  un bus comme ça, ça ne pardonne pas aux faibles et aux têtes en l’air.

On parcoure la banlieue. Cette vieille banlieue proche, dévisagée par les HLMs et l’industrie lourde du siècle dernier. Des entrepôts, vieux, moches, certains délabrés. Des passants fantômes. Du béton. Toujours rien de beau. On arrive à la A86. Nouvelle démonstration de darwinisme, automobile cette fois-ci. Le chauffeur du bus, sûrement un des meilleurs candidats, passe le test haut la main, et aura le plaisir de communiquer ses gênes d’homo automobilis à ses enfants. Ils en auront besoin vue la société qu’on leur prépare.

Je m’enfonce dans mon siège. Goldfrapp me rappelle qu’on sait encore faire du beau et me ramène à un semblant de gaieté pour démarrer la journée. Je pense à Alice, à cette vie toute vide ces temps-ci. Il faut que je me bouge le cul. Mais quand ?

9h. On arrive, enfin, je vois poindre la sortie de l’autoroute et ce joli bâtiment qui date de mathusalem et qui aurait dû s’effondrer depuis longtemps si on y avait mis un peu de bonne volonté. Mon bâtiment. Je peux même voir mon bureau.

Je badge, je rentre, bonjour tout le monde. Un collègue de bureau un peu autiste est déjà là. Un timide filet de vibration sonore sort de sa bouche, ses yeux évitant de croiser mon regard à tout prix quand il me sert la main. Je devine qu’il a voulu dire bonjour. C’est bien, demain on réessaiera avec le son hein ?

Je prends un thé, je dépile mes mails, je regarde ce magnifique panorama qui s’offre à moi : une sortie d’autoroute, paysage digne des plus beaux rejets de l’industrie communiste ukrainienne (total respect aux ukrainiens bien sûr, tous mes potes même s’ils ont tardé à arrêter Tchernobyl). Du béton, du béton, du béton. Des voitures, des camions, des klaxons, des pompiers, de flics, des ambulances. Tout le film de la vie urbaine qui défile sous mes yeux toute la journée, avec ce qu’il comporte de drames, d’accidents, de crissements de pneus, d’engueulades entre commerciaux trop pressés. D’habitude je trouve le spectacle rassurant.

Il faut dire que mon bureau dans ma précédente boîte donnait sur un incinérateur à ordure. Des milliers de tonnes d’ordures déchargées sur ce quai par des dizaines de camions poubelle de la ville de Paris qui passaient sous ma fenêtre toute la journée. N’y ai-je pas indubitablement gagné au change ? Le pire, c’est qu’il était bien coté mon bureau, recherché même, une fenêtre, pensez vous, quel privilège !

La journée passe, avec tout ce qu’il faut y mettre d’huile de coude pour essayer de se motiver, de garder son calme, de bouger les choses, de tempérance pour ne pas envoyer chier les cons, de modération dans vos propos pour ne pas avouer que vos chefs vous semblent inutiles. Il faut expliquer gentiment à vos supérieurs qu’on fait du travail de merde, digne de la pire industrie d’avant guerre basée en Ouzbékistan (total respect aux ouzbeks bien sûr, il me fallait un souffre douleur pour celle-là). On fait du politiquement correct. On respecte les processus. On gère les mauvaises nouvelles. On sourit aux casse-couilles, aux politiciens, à tous ceux qui vous planteront un couteau dans le dos à la moindre occasion. On conçoit aussi, accessoirement. Il paraît qu’on nous paye pour ça.

Il y a toutefois des moments où je pète un câble. Je ne peux tellement pas rentrer dans ce moule que je suis prêt à exploser. Généralement, ça commence par une mauvaise nouvelle. Le genre, au hasard d‘un croisement dans un couloir « Ah au fait tu sais le truc dont on avait parlé et où on était tombés d’accord, et bien on va être obligés de tout casser ». Et ça fait 6 mois qu’on base tout sur cette hypothèse.
Le drame se déroule alors en 9 temps.

1.Je vais aux chiottes, je me pose sur la cuvette en essayant de me calmer. Les chiottes, c’est vraiment le seul endroit où on peut être tranquille dans un boite : pas de bruits de PC, pas de collègue qui se plaint, pas de téléphone : toi et l’eau, toi et l’élément naturel eau, toi et la nature, toi et quelques bruits rapidement malodorants,
2.Je n’y arrive pas (à me calmer), alors je sors des chiottes et je vais à la machine à café,
3.Le café y est dégueulasse, je n’en prends pas et je regarde passer les voitures dehors,
4.Comme je peux le faire de mon bureau, l’activité devenue habituelle ne me calme pas,
5.Je vais donc voir mon chef de projet, généralement de bon conseil,
6.Je fais mine que tout va bien, mais comme il me connaît, il dépiste le problème rapidement,
7.La soupape de sécurité cède, puis c’est le couvercle entier qui lâche et je déblatère mes malheurs pendant 2h, après quoi le torrent commence à se calmer,
8.Quand son tympan droit est définitivement hors service, il me dit qu’il est d’accord mais qu’il ne peut rien y faire
9.Je rentre chez moi.

Mais c’est rare notez bien ; d’habitude je suis d’un calme olympien devant toute cette hypocrisie.

Parfois aussi une perle tombe. Il reste des bouts d’humanité dans ce moule qui veut nous faire ressembler à des robots. La petite Pamela (même service mais autre bâtiment, hélas) m’envoie un mail pour savoir si ça va ( ;-) ), si on peut se boire un verre un de ces jours ensemble ( ;-)) )  et aussi me demander si je connais le mec au deuxième étage avec une chemise brune à carreau (grrrr). Sacré Pamela. Il y a vraiment des filles qui ont des yeux mal placés.

Il y a les déconnades à midi, les petites stagiaires qui humanisent un peu le site, les blagues stupides qui font rire, les courses de chaise, les concours de barbe (difficile de faire ça partout mais c’est de l’humour long terme), les parties de hockeys dans les couloirs (pas fait depuis mon ancienne boite) les petits bonjour souriants de demoiselles inconnues mais polies et qui vous font rêver l’espace d’un instant.

Il y a aussi les « joutes verbales » quand un passionné vient débattre (se battre ?) d’un sujet technique difficile et la discussion part en vrille car nous sommes tous les deux passionnés. On ne s’en veut pas mais on finit après avoir noirci 4 tableaux Velleda entiers, comme deux boxeurs, la chemise qui sort du pantalon, les veines frontales saillantes, les cheveux en pétard, l’adrénaline dans le sang. Le service entier a battu en retraite, lassé du volume sonore de notre explication. Mais on est d’accord. C’est bon des fois de se rappeler pourquoi on voulait faire ce boulot.

Et il est 19h30, putain, déjà 19h30. J’ai l’impression de ne rien avoir fait, et ma to do list n’a pas diminué d’un poil. Et je n’ai même pas pris de pause café de la journée.

Je rentre. A86, puis changement. Je passe par l’extérieur. Je marche sur une première page d’un journal abandonné qui titre une manifestation quelconque pour une cause quelconque. On est tellement loin de ça. Ils ont le temps de manifester, eux ? Il fait nuit, l’air est froid. Les gens ne croisent pas votre regard. Tout le monde s’en fout de vous ici. Je m’enfile dans un tunnel, je me sens cloporte dans ces kilomètres de galerie. J’atteins mon suppo métallique. Les passagers font la gueule. 2 personnes parlent dans tout le wagon. Tout le monde se dit que s’ils la fermaient, ca serait mieux. Le pire, c’est que cette pensée me traverse l’esprit. Je monte le son. Massive Attack accompagne mon retour.

Dans le hall de mon immeuble, un de mes voisins qui sortait ses poubelles en jogging-pantoufles m’alpague pour me parler de la prochain assemblée de copro. De quoi ? De copro ! Ah oui, là où on va décider le nombre de pot de fleurs à mettre dans l’entrée. Mettez m’en 4 tiens, de toutes façons je n’aurai pas le temps de venir, je suis en déplacement le lendemain. Lui est administratif fonction publique pure souche. Parfois quand je prends un RTT, je le vois rentrer à 17h, 17h30 en période de pointe.

20h30, je rentre chez moi, laminé. Je crois que j’ai besoin de vacances.

Taliesin
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21 février 2006 2 21 /02 /février /2006 19:53
Bon, apparement, les critiques sont positives, et certaines (curieusement pas certains!) en redemandent.

Voici donc un truc fait en vitesse hier soir. J'éspère que l'intéressée se reconnaitra, sinon c'est la honte pour moi ;-)



Taliesin
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